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Début des migrations en août

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Août dans la prolongation de juillet se caractérise par de fortes chaleurs mais nous sommes finalement en été. Nombre d’espèces animales ont besoin de ces périodes estivales chaudes notamment les insectes pourtant en si nette diminution ces dernières années. Ils sont aussiune des bases essentielles de la chaîne alimentaire ! Les espèces en début de migration comme les cigognes blanches ou noires, les milans noirs, ont absolument besoin des courants d’air chauds pour pratiquer le vol plané favorisé par les courants thermiques. Le vol battu pour ces oiseaux peu musclés est source de bien fortes dépenses énergétiques. Les petits échassiers (les limicoles) qui passent aussi en dehors des vastes vasières du littoral, apprécient les faibles niveaux des marais ou les berges découvertes des plans d’eau où ils peuvent plus facilement se nourrir. Chevaliers culs-blancs ou guignettes et bécassines des marais vont ainsi exploiter les berges des ballastières bien trop profondes pour eux en période de hautes eaux. Dans votre jardin, si vous étiez éloigné de toute zone humide, vous pouvez mettre de l’eau fraîche (à changer chaque jour) dans une vaste soucoupe peu profonde. Nombre de passereaux viendront y boire et s’y baigner. Bien sûr une période de sécheresse trop prolongée peut avoir des conséquences néfastes sur les cours d’eau où les espèces sont plus tributaires d’eau mieux oxygénée, obligeant dans certaines régions de moyenne montagne à des sauvetages de poissons à forte valeur patrimoniale.

L’important est que les mois pluvieux de fin d’été et d’automne dans la tradition des saisons dans notre région le soient pour remettre en eau nappe phréatique, zones asséchées et végétation avant le repos hivernal. Néanmoins, un printemps assez sec, en tout cas pas humide et froid, ne peut qu’être favorable à la reproduction de nombre d’espèces. Ainsi les moineaux domestiques n’ont jamais été aussi nombreux dans les villages avec une forte productivité de jeunes tant en première qu’en deuxième couvée. Cet oiseau est en effet d’origine méridionale et a suivi l’Homme agriculteur depuis le Moyen-Orient.

Un superbe papillon à l’origine quasi éteint dans les Hauts-de-France y montre des signes de retour. Sur les côteaux calcaires notamment au sud d’Amiens et dans l’Oise des observations de flambé se multiplient. Ce grand papillon (7 à 9 cm d’envergure) est un adepte des friches et prairies buissonnantes où pousse le prunellier, sa plante nourricière. Il se reconnaît à sa livrée blanche-jaune pâle zébrée de noir. Les longues « queues » en bas des ailes ont chacune à leur base une tache orange bordée de bleu. Quand il a la tête en bas (sa position favorite !), ces taches font penser à de gros yeux et les deux queues des antennes dressées détournant l’attaque d’un prédateur comme un oiseau sur une partie non vitale de l’insecte.

Pour combattre la chaleur excessive les oiseaux disposent de divers moyens comme l’ouverture du bec pour une meilleure ventilation. Elle peut être associée à un mouvement de la poche gulaire située sous la mandibule inférieure destiné à favoriser l’évacuation de la chaleur corporelle en absence de glandes sudoripares. Les ailes peuvent être décollées du corps pour favoriser la circulation de l’air et éviter de garder la chaleur. Les grands échassiers comme les cigognes ont l’habitude en fortes chaleurs de se fienter sur les pattes exposées afin d’améliorer l’effet rafraîchissant grâce à cette pâte blanche et liquide à consistance crémeuse (mélange d’urine et de fèces). Ceux qui ont encore des poussins leur font de l’ombre avec le corps ou ouvrent leurs ailes comme un parasol !

Alors qu’août est synonyme de migration, d’émancipation juvénile, de recherches de nouveaux territoires pour certains, nous sommes en période… de reproduction pour d’autres ! Ainsi de mi-juillet à mi-août les chevreuils sont en plein rut. Les brocards âgés ont délimité un territoire dès avril et en ont chassé les jeunes mâles. L’été est la période où les chevrettes adultes peuvent être fécondées lors d’une période d’œstrus très courte (2 jours toutes les quatre semaines) et où les mâles ont la plus forte production de spermatozoïdes. Le brocard poursuit ou plutôt harcèle la ou les femelles en chaleur présentes sur son territoire. Parfois, le couple éphémère tourne bien longtemps en rond autour d’un buisson ou d’un arbrisseau. Sur le sol aussi se dessine alors un véritable petit sentier circulaire. C’est le célèbre « rond de fée » ou « rond de sorcière » qui a donné lieu en des temps anciens à bien des légendes… Le brocard souvent n’est pas totalement monogame. Il peut s’accoupler avec plusieurs femelles qui se sont établies sur tout ou partie de son territoire ou même aller conter fleurette sur des territoires voisins à ses risques et périls. Le rut terminé, la femelle retrouve ses faons de deux mois quelque peu traumatisés par l’impulsivité du brocard. Le développement de l’embryon ne se fera qu’à partir de janvier de l’année suivante pour synchroniser les naissances au milieu du printemps (ovo implantation différée). Ce phénomène se retrouve chez quelques rares mammifères comme la martre, la fouine, le blaireau, les chauves-souris ou les phoques. Chez les cervidés, seule la chevrette connaît la diapause. Les embryons cessent de croître et ne s’implantent dans la paroi utérine qu’en janvier, stationnant en attente dans la trompe durant cinq à six mois, cela permettra aux jeunes de naître au printemps à la période optimale. Quant aux mâles épuisés par ces ébats et d’éventuels combats ardus avec les voisins ou des jeunes nomades, ils vont finir par délaisser leur territoire et se faire bien discrets durant la fin de l’été.

Ph. Carruette  10 aout 2020 crédit photo V. Caron