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Le martin pêcheur

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L’année commence dans la douceur hivernale comme à son habitude depuis quelques années.

 

 

Les premiers jours de janvier peuvent être bien choisis pour faire une balade le long d’une rivière. A cette période le lieu est certes plus calme. On remarque tout de suite que les niveaux du cours d’eau ont bien augmenté par rapport à l’été. Les pluies abondantes à partir de fin septembre ont logiquement rechargé les nappes et cours d’eau comme à leur habitude. Toute zone humide au fil des saisons vit sa période d’assec estivale puis d’abondance voire certaines années de crue en automne et fin d’hiver. Ce sera l’occasion dans votre balade, surtout si le temps va aux gelées, de croiser sûrement le Martin pêcheur. A peine a-t-on le temps de le voir passer comme une flèche bleue au ras de l’eau qu’il a déjà disparu. C’est là qu’il faut vite repérer où il va se poser. Il a ses perchoirs de pêche habituel où il sait que « le coin » est favorable à la capture de petits poissons ou invertébrés aquatiques. En cette période de grisaille, c’est agréable de voir que le Martin pêcheur possède un des plumages les plus éclatants de nos oiseaux européens. C’est aussi paradoxalement aussi un plumage de camouflage. Selon la lumière le bleu du dos et des ailes varie de milles nuances en harmonie avec l’eau. Le ventre orange rouille se marie bien aussi avec les berges sablonneuses où il niche dès mars. Le martin se nourrit essentiellement de petits poissons (de moins de 10 cm) et d’insectes aquatiques. Il apprécie les étangs, fleuves et rivières et parfois même en hiver le bord de mer. Sa méthode de pêche consiste à se poster sur une branche à l’affût du moindre mouvement aquatique. Puis il se raidit, rabattant ses plumes, et plonge complètement sous l’eau ailes entrouvertes. Les yeux fermés par la membrane nictitante, le martin se saisit de la proie sous l’eau. Il ressort le poisson au bec, éclair d’argent tout frétillant. Il assomme souvent sa proie sur la branche où il se repose, avant de l’avaler la tête la première dans le sens des écailles. Chaque plongeon n’est bien entendu pas une réussite. L’oiseau rate souvent sa proie, notamment les juvéniles encore peu expérimentés. Un hiver doux est une aubaine pour celui qui craint les surfaces d’eau prises par les glaces le privant de sa nourriture en bordure de berge. Une adaptation remarquable peut lui sauver la vie, celle de pêcher en vol sur place, à la manière d’un colibri, pour atteindre des zones d’eau libres plus au large des berges. Mais cette technique est moins fiable et demande beaucoup plus d’énergie. Il ne faudrait pas en conclure que le Martin pêcheur est strictement sédentaire. Les informations dues au baguage montrent que les adultes nicheurs sont plutôt sédentaires. Les jeunes par contre quittent le territoire de naissance sous la pression des adultes sans direction bien définies. Ils ne vont pourtant pas occuper un territoire tout proche même si celui-ci est vacant. Des oiseaux venant de Belgique, Pays Bas, Allemagne, voire d’Europe centrale gagnent la France.  Deux jeunes Martins bagués près d’Amiens ont été repris quelques semaines plus tard dans l’Orne et aux Pays Bas montrant un erratisme juvénile multidirectionnel. Après une période de déclin entre 1970 et 1990, la population européenne semble avoir retrouvée des effectifs conséquents sans pour autant avoir atteindre ses effectifs initiaux. En France, la population nicheuse n’est que de 30.000 couples. L’hiver doux permettra un taux de survie plus fort des jeunes de première année qui devront trouver le meilleur territoire de reproduction au printemps. Cette notion territoriale forte va vite provoquer une saturation des effectifs faute d’habitat favorable.

P Caruette 8 janvier 2020

Crédit photo R Daugeron